Kobane calling s’ouvre sur une nuit, seulement troublée par le bruit des armes. "Ratatata, c’est Daech ; Toum Toum Toum, c’est nous", explique un combattant kurde à Zerocalcare. "Et Sboom ?" demande le dessinateur-reporter. "Sboom, ça dépend : Feu et Sboom, c’est les Américains ; Sboom tout seul, c’est Daech." Sur près de 300 pages, l’auteur italien rendu célèbre par La prophétie du tatou (400 000 exemplaires vendus en Italie, publié en France chez Paquet) va ainsi s’attacher à éclaircir pour le public la nuit dans laquelle s’est enfoncée la Syrie au fil de cinq ans de guerre.

Zerocalcare a été envoyé à Kobané par le magazine italien Internazionale. Il impressionne par la vivacité de son regard, la multiplicité de ses points de vue et un humour nourri par sa riche expérience de blogueur : le Français Boulet a été l’une de ses principales influences. Organisant son livre en dizaines de séquences subtilement enchaînées. Il propose, avec un dessin qui va à l’essentiel, aussi bien des choses vues que des impressions personnelles dans lesquelles s’insèrent des bribes de sa propre vie en Italie, et des récits prodigués par certains de ses interlocuteurs.

Peu à peu se dévoile le quotidien des combattants, et surtout des combattantes qui ont joué un rôle clé dans la fameuse bataille de Kobané de 2014-2015. Le reporter parvient à faire ressortir très concrètement l’enfer de la guerre comme la complexité des équilibres géopolitiques de la région. Fabrice Piault