8 octobre > Littérature France

Sous un titre énigmatique, Noireclaire, dont lui seul possède la clef, Christian Bobin nous offre, en même temps qu’à une femme aimée disparue depuis vingt ans qu’il s’en va visiter au cimetière, ce qu’il appelle "un petit bouquet mortuaire". Manière de dire à la fois la modestie et l’humilité de l’entreprise, d’en donner aussi la tonalité. S’adressant à la chère disparue, Bobin la fait revenir telle qu’elle semble avoir été, un peu bohème, amoureuse des livres et femme de caractère.

Mais, comme toujours chez Bobin, ce livre est composite et inclassable. Ecrit de nuit, il mêle aphorismes ("Le manque est la lumière donnée à tous"), courtes histoires, souvenirs personnels, bribes de lectures, poèmes en prose. Et même, à un moment, cet aveu surprenant : "Je veux tuer Christian Bobin." On l’interprétera comme une métaphore de sa quête du dépouillement, de son cheminement vers l’essentiel, cet univers dont les éléments, de livre en livre, sont constants : la nature sauvage, fleurs, oiseaux et autres animaux, la forêt, la musique de Bach, son compositeur de prédilection. Et la mort, bien sûr, celle de l’autre, ou la sienne, souvent envisagée, on n’ose dire avec sérénité.

Comme pour prolonger son livre, Christian Bobin a écrit un long texte, "L’indestructible", qui accompagne La prière silencieuse, recueil de photographies de Frédéric Dupont sur la vie monastique, là où en principe nul profane n’est censé pénétrer. "L’image absolue, écrit Christian Bobin, celle qui nous délivre des images, s’élabore dans la clôture d’un monastère." Lui, il a l’œil absolu. Jean-Claude Perrier

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