La décision tranche un différend porté en justice en 2012, alors que les deux entreprises travaillaient ensemble depuis la fin des années 90, et avaient progressivement noué des relations de plus en plus étroites. En 2001, Québec Amérique avait commencé à publier deux dictionnaires pour le compte de Druide. A partir de 2004, Druide Informatique avait intégré le contenu du dictionnaire Le Visuel, un des produits phares de Québec Amérique vendu à près de 12 millions d'exemplaires en version papier, dans le logiciel de rédaction et correction à la base de son activité.
Tentatives de négociation
Les relations ont commencé à se dégrader fin 2009, lors du lancement d'une nouvelle version d'Antidote baptisée HD. Elles se sont envenimées lorsque Druide a lancé un département éditorial, embauchant d'anciens cadres de Québec Amérique, et reprenant une partie de ses auteurs. Après diverses tentatives de négociation, Québec Amérique déposait un recours en août 2012, qu'elle a tenté de faire passer en procédure accélérée, ce qui lui a été refusé en janvier 2013. Une procédure annexe a aussi été ouverte devant la commission des marques, sans succès pour Québec Amérique.
En dépit de l'opposition clairement formulée par l'éditeur du dictionnaire, Druide Informatique a continué d'utiliser les contenus du Visuel pour les versions successives de son logiciel (Antidote 8 en 2012, et Antidote 9 en 2015), affirmant détenir une licence implicite irrévocable, à durée illimitée, ce que la société n'a pas réussi à démontrer devant la Cour. Le retrait de ces contenus aurait vraisemblablement beaucoup retardé la sortie des mises à jour. Druide ne pourra plus les utiliser dans les versions suivantes de son logiciel, à compter de 2018.
"Victoire de principe"
Québec Amérique demandait au total 875000 CAN$ (578000€) de dommages-intérêts. La Cour lui a accordé 100000CAN$ de dommages-intérêts matériels, correspondant à un projet de transaction un moment envisagé entre les deux ex-partenaires pour le maintien des droits d'utilisation du Visuel jusqu'en 2018. Elle a ajouté 25000CAN$ de dommages-intérêts exemplaires.
"La personne ou entité qui désire utiliser la propriété intellectuelle d'autrui doit impérativement obtenir son consentement. Cette victoire de principe en faveur du respect du droit d'auteur est cruciale pour le maintien de la vitalité de la culture à tous les niveaux" déclare Jacques Fortin, président fondateur de Québec Amérique. Contacté par mail à propos du nombre de clients français de son logiciel, et d'une décision concernant un éventuel appel, Druide Informatique n'avait pas retourné d'information avant le bouclage de cet article.