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Accusée d'indécence, une maison d’édition contrainte de fermer en Algérie

Inaâm Bayoud, lauréate du prix Assia Djebar.jpg - Photo X

Accusée d'indécence, une maison d’édition contrainte de fermer en Algérie

Suite à la publication du roman Houaria d’Inaâm Bayoud, les éditions MIM ont été ciblées par les conservateurs algériens.

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Par Léon Cattan
Créé le 19.07.2024 à 12h30

« Il n’y a aucun intérêt ni aucun sens à lutter contre l’absurdité. » Le 16 juillet, les éditions MIM ont annoncé leur fermeture dans un communiqué. S’adressant au monde du livre, elles écrivent : « Préservez le pays de la discorde et préservez le livre, car un peuple qui lit est un peuple qui n’est ni asservi ni affamé. » Une conclusion appropriée pour une maison contrainte de renoncer sous la pression des conservateurs algériens.

Accusations d’encourager la « fornication » et la « prostitution », cyber-harcèlement et menaces en pagaille… Tout a commencé avec la publication du roman Houaria d’Inaâm Bayoud, non-traduit en France.

Le 9 juillet 2024, l’autrice et traductrice reçoit le prestigieux prix Assia Djebar en présence de la ministre de la Culture, Soraya Mouloudji. Un choix qui n’est pas au goût de tous : sur les réseaux sociaux, des internautes et certains écrivains à l’instar de Tayeb Sayad s’insurgent. Ils jugent le livre mal-écrit, et surtout, en inadéquation avec les valeurs morales de la société algérienne.

Le sujet d’Houaria est des plus épineux : il exhume la « décennie noire » qui frappa le pays de 1991 en 2002, une période d’affrontements violents entre le gouvernement et les islamistes, et la raconte à travers un récit polyphonique où gravite une chiromancienne.

Soutien de figures éminentes de la littérature algérienne 

Défendu par les membres du jury du prix Assia Djebar, il bénéficie aussi du soutien de certaines figures éminentes de la littérature algérienne, comme celui de l’écrivain et éditeur Lazhari Labter : « Je m'arroge le droit de crier haut et fort mon indignation face à ces brûleurs de livres qui ne connaissent rien de la littérature arabe et algérienne, écrit-il. Ils ne crieraient pas haro sur le baudet, s'ils avaient lu Imrou'l Qays, l'un des piliers fondateurs de la poésie arabe pré-islamique ou Nizar Qabbani, l'autre pilier fondateur de la poésie amoureuse arabe contemporaine, s'ils avaient ouvert ne serait-ce qu'un roman de Tahar Ouettar, Rachid Boudjedra, Djilali Khellas ou encore Amin Zaoui dont les romans fourmillent de mots, de phrases et de passages qui feraient éclater leurs chastes tympans de fausses vierges effarouchées. »

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