Inquiétudes et réduction de services
Le devenir de ces collections inquiète cependant les agents des bibliothèques desservies par la médiathèque départementale, dont certaines ne fonctionnent qu’avec des bénévoles. "Le bibliobus est passé il y a quinze jours mais on nous a dit que ce serait la dernière fois, témoigne une bibliothécaire. Rien n’est officiel, mais il n’y aura sans doute plus de desserte en 2020. Or, l’apport des collections de la médiathèque départementale est essentiel pour nos petits établissements. Elles représentent 30 % de nos fonds, parfois plus. Comment allons-nous répondre aux demandes de documents de nos usagers individuels ou aux scolaires ?".
Autre initiative qui provoque le malaise : le conseil départemental a proposé aux bibliothèques du réseau de venir prendre les ouvrages de la médiathèque départementale et de les stocker dans leurs établissements. Plusieurs bibliothèques ont décidé de décliner l’offre afin de "ne pas participer au démantèlement des collections de la médiathèque départementale".
Jean-Luc Billand, directeur général adjoint des services du conseil départemental des Alpes de Haute-Provence, dément toute tentation de sa tutelle de se désengager de sa mission en matière de lecture publique et explique que la situation actuelle, certes inconfortable, n’est que transitoire. Elle s’inscrit dans la réflexion menée actuellement par le département, qui a adopté un plan départemental de lecture publique fin 2018 pour la période 2019-2023, pour faire évoluer l’offre de service en fonction des besoins du réseau.
Désherbage et nouvelle organisation
"Nous allons procéder au désherbage des collections qui sont vieillissantes, indique Jean-Luc Billand. Pour les collections restantes, nous réfléchissons à une nouvelle organisation de la desserte documentaire car nous avons notamment constaté que les nouveautés étaient mises en circuit dans des délais trop longs. Nous envisageons effectivement de dispatcher les collections départementales entre les bibliothèques. Elles tourneraient entre les établissements par un système de navettes comme actuellement mais directement entre les établissements du réseau et non à partir de la médiathèque départementale. Tout cela se fera en concertation avec les établissements".
Entre 60 et 70 % des collections pourraient être supprimés pour cause d’obsolescence. Le directeur général adjoint des services reconnaît que cette phase intermédiaire entraînera temporairement une réduction du service de desserte documentaire, les expositions itinérantes de la médiathèque départementale restant quant à elles accessibles.
La nouvelle organisation ne pourra de toute manière se mettre en place qu’après les élections municipales. "Il faut attendre que les nouvelles équipes qui seront en place expriment leurs positions en matière de lecture publique", justifie le représentant du département.
"Je comprends que cette phase soit anxiogène pour les établissements du réseau, admet Jean-Luc Billand. Mais il ne s’agit en rien d’un désengagement. Les élus du conseil départemental sont très attachés à la question de la lecture publique et à l’outil que représente la médiathèque départementale dont le budget pour 2020 vient d’être reconduit".
Concernant la médiathèque départementale, le conseil départemental prévoit de lui attribuer des espaces pour ses collections dans le futur bâtiment des archives départementales qui devrait voir le jour en 2022. La surface qui lui sera attribuée, qui devrait être au moins de 1400 m2 selon les recommandations du ministère de la Culture, n'est pas encore connue.
Intérêt national
Signe encourageant : le département des Alpes de Haute-Provence et le ministère de la Culture viennent de signer, via la Direction régionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur, un contrat départemental lecture-itinérance (CDLI) autour de la médiation numérique.
L’avenir de la médiathèque départementale est en tout cas observé attentivement par la communauté professionnelle. Plusieurs bibliothécaires des établissements desservis par la médiathèque départementale ont adressé le 14 décembre un courrier à la présidente de l’Association des bibliothécaires de France, aux deux présidentes de l’Association des directeurs de bibliothèques départementales, ainsi qu’au conseiller pour le livre et la lecture de la Direction régionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur, avec copie au président du Conseil départementale des Alpes de Haute-Provence.