Ascension et déchéance sont des thèmes chers à Robert Goolrick. Dans le rédempteur La chute des princes (Anne Carrière, 2014, paru chez 10/18), l’écrivain américain avait raconté sa première vie de jeune golden boy dans les années 1980, terminée en crash spectaculaire. Après l’incendie que l’écrivain américain installé dans sa Virginie natale publie d’abord en France avant sa sortie aux Etats-Unis pourrait s’appeler aussi la chute de la maison Cooke. C’est une sorte de conte plein de passions incendiaires où se déploient la grandeur et la décadence d’une famille historique du sud des Etats-Unis à travers le destin de Diana Cooke Copperton Cooke, disparue à 41 ans dans l’incendie de sa maison en 1941. Autant en emporte le feu : Saratoga, décrit Goolrick, était la plus belle maison de Virginie, l’une des plus fabuleuses de tout le pays : une demeure fastueuse, en bord de rivière jouissant de kilomètres de berges de "sable opalin", trônant sur 2 000 hectares de terres rendues fertiles par l’exploitation de centaines d’esclaves. En 1999, plus de cinquante ans après le mystérieux incendie qui a réduit la maison en cendres, un journaliste fasciné part sur les traces de Diana, héritière légendaire. De l’enfant unique, fillette gâtée qui a grandi en sauvageonne dans cette propriété appartenant à sa famille depuis cinq générations, à l’adolescente rééduquée dans une rigide école privée. Du bal des débutantes où l’éblouissante jeune première est donnée en pâture à des vieux milliardaires pour sauver le domaine de la faillite, au mariage désastreux avec le très riche "capitaine" Copperton. La femme mal mariée, la mère lointaine et frustrée, la veuve déclassée réanimée en amoureuse coupable… : toutes les vies de Diana, princesse d’un château qui est "tout pour elle, sa gloire et son fardeau".
Romantique et charnel, ce roman, qui est suivi d’une courte nouvelle rattachée à la veine autobiographique du terrible Féroces (2010), fouille les décombres d’un monde de sang, de sueur et de larmes, disparu dans un bûcher dévastateur. V. R.
