Philippe Tesson, président du prix Interallié. - Photo Olivier Dion
Décès de Philippe Tesson à 94 ans
L'homme de lettres et de théâtre, président entre autres du prix Interallié, est décédé jeudi 2 février à l'âge de 94 ans.
Par
Pierre Georges
avec AFP Créé le
02.02.2023
à 12h24, Mis à jour le 02.02.2023 à 17h06
Le journaliste et homme de lettres Philippe Tesson, qui a chroniqué la vie politique et culturelle en France pendant plus d'un demi-siècle, est décédé à l'âge de 94 ans, a-t-on appris jeudi auprès du Théâtre de Poche-Montparnasse à Paris, qu'il dirigeait.
Ce patron de presse, entrepreneur, homme de théâtre, mais aussi polémiste connu pour son franc-parler, s'est éteint à son domicile de Chatou (Yvelines) mercredi, a précisé le jury du prix Interallié.
Rédacteur en chef du légendaire journal Combat (1960-1974), Philippe Tesson a fondé son propre journal, Le Quotidien de Paris, qu'il a dirigé pendant 20 ans (1974-1994). Il a été pendant plus d'une décennie critique dramatique au Canard enchaîné et longuement chroniqueur, théâtral au Figaro Magazine et politique sur le site internet du Point, de Valeurs actuelles ou encore de L'Express.
« Je suis un journaliste, c'est-à-dire un écrivain du moment, et non pas de la durée. J'ai choisi de privilégier l'action par rapport à la contemplation », confiait-il dans les colonnes de cet hebdomadaire en 2019.
« Un Jean d'Ormesson caustique et anticonformiste, vestige intéressant d'un temps où la presse était encore riche de dandys », comme le dépeignait Libération dans un portrait de 2011. « Un voltairien impliqué dans la mêlée et détaché, insolent au fleuret, un coup à gauche, un coup à droite, cavalier au clavier, méchant parfois parce que ça maintient », selon le quotidien suisse Le Temps.
« Aujourd'hui, les journalistes peuvent encore tout dire mais on n'en trouve plus beaucoup pour le dire », regrettait-il.
« Bourgeoisie éclairée »
Né le 1er mars 1928 à Wassigny dans l'Aisne, il dit avoir « été constitué par la guerre » , avec l'occupation de son village qui l'a marqué. S'il débute sa carrière en tant que secrétaire des débats parlementaires à l'Assemblée nationale, ce diplômé de Sciences Po s'oriente très vite, et "par hasard", vers le journalisme, en devenant à 32 ans rédacteur en chef du journal d'Albert Camus, Combat. Il le quittera au bout de quinze ans en raison d'un "grave différend" avec son directeur Henri Smadja.
Il fonde ensuite avec sa femme Marie-Claude Tesson-Millet (décédée en 2014) Le Quotidien du Médecin, dont le succès lui permettra de créer son propre quotidien généraliste en 1974, Le Quotidien de Paris, lancé avec une partie de l'équipe de Combat. Avec ce quotidien libéral, soutien de Valéry Giscard d'Estaing puis opposant à François Mitterrand, il met le pied à l'étrier à de nombreuses personnalités : Eric Zemmour, Jean-Marc Sylvestre, Catherine Pégard, Claire Chazal...
« Le Quotidien a été le journal d'une génération, d'une bourgeoisie éclairée », décrivait-il fin 2017 dans L'Opinion. Deux ans après son départ en 1994, la publication cessera.
Philippe Tesson en 2008 à la Comédie française - Photo OLIVIER DION
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Un homme de lettres total
Ses grandes passions, le théâtre et la littérature, lui viennent de sa mère. « Elle m'a appris la supériorité de l'expression sur l'introversion. Elle était théâtrale et extravertie », racontait-il au Temps.
Si Philippe Tesson fut un homme de lettres total, à la carrière majoritairement tournée autour des livres, il n'a lui même signé que peu d'ouvrages. Il a été l'auteur, ces dernières années, d'un certain nombre de préfaces, et avait signé par le passé De Gaulle 1er : la révolution manquée (Albin Michel, 1965), Où est passée l’autorité ? (Nil éditions, 2000) avec l’éditorialisteLaurent Joffrin ou encore Au cœur de 68 avec Bruno Barbey (Editions du pacifique, 2018), initialement publié dans Combat.
Côté théâtre, cet amateur de piano dirigeait avec sa fille Stéphanie le Théâtre de Poche-Montparnasse depuis 2013 et avait racheté une librairie, ainsi que deux maisons d'édition - Quatre vents et L'Avant-scène théâtre - la dernière disposant également d'une revue bimensuelle du même nom, qu'il dirigeait.
Il avait par ailleurs été animateur d'une émission sur France 3 ("Ah! quels titres"), chroniqueur sur Paris Première ou encore directeur de l'hebdomadaire Les Nouvelles Littéraires (1975). Il avait rejoint le jury du prix Interallié en 1993, prix qu'il présidait toujours.
Avec ses deux autres enfants (la journaliste Daphné et l'écrivain voyageur Sylvain), il se ressourçait dans la maison familiale en bord de Seine, comme le raconte avec humour le prix Interallié 2022, Philibert Humm dans Roman fleuve.
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