Il faudra que quelque historien de la littérature, un jour, recense tous les livres qui ont été écrits, non point sur, mais durant l'épidémie de Covid et ses confinements à répétition. Rarement les écrivains auront eu autant besoin de s'échapper − surtout quand, comme François Garde, ancien préfet des Terres australes, ce sont des voyageurs au long cours −, et les lecteurs de les accompagner. C'est donc durant l'année 2020 que François Garde a composé environ la moitié de son recueil A beau mentir qui vient de loin.
Comme ce texte succulent, « Onze raisons de ne pas aller à Fougères », provoqué par l'annulation d'une rencontre avec des lycéens de l'ancienne place forte bretonne : il réalise soudain que la ville n'est pas au bord de la mer, ni en Nouvelle-Zélande, qu'elle est bâtie sur un sol radioactif, et une soucoupe volante empêche son train d'y arriver... Il y a aussi cette réflexion sur l'écriture, le récit de ses débuts en littérature (à 50 ans, avec le multi-primé Ce qu'il advint du sauvage blanc, Gallimard, 2012), ou encore l'histoire de ce marquis qui, par dépit amoureux, s'embarque pour les lointains... en rêve.
Notre seul regret, une fois ce livre dégusté, c'est que l'auteur ait brûlé ici ce qui aurait fait un formidable roman : l'aventure du jeune Bourguignon Marcel D. dont la photo, prise par un GI libérateur, est devenue, à son insu, durant quarante ans aux États-Unis, le symbole de la France souffrante, puis une icône gay ! Mais on est sûr que Garde garde encore beaucoup de sujets en réserve.
François Garde
A beau mentir qui vient de loin
Gallimard
Tirage: 8 000 ex.
Prix: 16 € ; 176 p.
ISBN: 9782072973000