Raoul, 9 ans, est dans une école où l’on fait de la musique en vue d’intégrer le conservatoire. En un mot, une voie royale dont l’une des mères résume bien le principe : "Pour mon fils, ce sera tennis caté piano jusqu’à la troisième, et plus tard il me dira merci." Remarquable par ses gamelles dans les matières autres que piano, Raoul l’est aussi par la couleur de sa peau. Il est le seul métis de son école, à part Dido, "une adulte qui range les classes après les cours". Sa mère est morte quand il avait 4 ans, mais "c’est pas triste", dit-il. Il ne s’en souvient pas. Dans la vie, il aime tout, sauf les filles. Etre amoureux ? Quelle horreur ! Tout le contraire de son copain Rito, qui, lui, est un vrai cœur d’artichaut et en pince pour Ursala Donfala, une blonde qui aime Chopin et la musique niaise de Petit poney. Lui, Raoul, serait plutôt du genre à aimer "Cheval sauvage qui galope dans la steppe infinie". Avec Laurent, son professeur de piano, il est à bonne école ! Celui-ci part comme un pirate à l’abordage des touches de son instrument et porte un éternel pull vert tout bouloché qui le fait ressembler à un sapin. A l’inverse de Mme Zabourevski, sa collègue, que tous les parents convoitent pour leurs rejetons, il n’est pas, malgré son prix Marguerite-Long, le chouchou des géniteurs. Sous l’aile de son mentor outsider, Raoul le petit dur va faire ses gammes jusqu’à l’éblouissement. Au piano comme dans la vie. Un premier roman dont on aime la plume alerte et ironique, mais aussi la touche poétique et audacieuse. Fabienne Jacob