Elle chérit la littérature, mais ne s’y enferme pas. Elle s’engage, mais moins politiquement que par des choix profonds de société. Surtout, elle place au-dessus de tout son ancrage social, une relation étroite et même intime avec sa clientèle, dans toute sa diversité. Une nouvelle génération de libraires est née, qui mise tout autant sur l’espace de la librairie, conçue comme un foyer de rencontre et de commerce dans tous les sens du terme, que sur tous les moyens d’en sortir pour la faire rayonner dans la cité.
Cette génération de libraires trentenaires a bénéficié du climat favorable à la librairie institué par le déploiement du plan de soutien annoncé en 2013 par la ministre de la Culture d’alors, Aurélie Filippetti. Mais elle est d’abord le produit d’une société horizontalisée par les nouveaux réseaux sociaux, qui décomplexent ses échanges avec son public comme avec les éditeurs et ses autres partenaires dans la chaîne du livre. En proclamant faire "le même métier qu’un barman", Cécile Coulette (La Cour des grands, à Metz), loin de déchoir, affiche une vraie ambition : celle de placer sa librairie à l’intersection des préoccupations et des attentes des citoyens, au carrefour des débats, des tendances autant que des modes qui traversent la société.
Est-ce ce nouvel état d’esprit qui a séduit Charlélie Lecanu et Edouard Delbende ? Agés respectivement de 24 et 23 ans, ces deux jeunes diplômés de l’ESCP se disent à la fois "lecteurs avides et clients assidus des librairies". Ils entament à vélo un tour du monde de dix mois pour "faire découvrir et mettre en valeur les libraires francophones". Livres Hebdo a décidé de les accompagner. Nous leur donnerons régulièrement la parole dans nos colonnes. Ils rendront compte de leurs rencontres, de leurs découvertes, de leurs surprises dans les librairies francophones d’Europe, d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie, portant d’autres regards sur une profession en effervescence.