Chez Dominique A(né), cet écorché vif, qui se voit « pessimiste », « fataliste » et « impatient », entre autres, tout part d'une émotion, d'un moment, d'un événement, important ou non. Une rencontre avec Gérard Manset, par exemple, « l'ermite chantant », qui vient le voir à la fin de l'un de ses concerts, lui inspire un texte, lequel deviendra chanson. Ou bien, un jour, un ami associe dans une phrase l'initiale du prénom de sa compagne L(aetitia Velma), elle-même artiste, et la première syllabe de celui de leur fils Or(son) - l'autre s'appelle Youri, ce livre leur est dédié -, cela donne L. et Or., puis Eléor, une contrée mythique, une île bienheureuse où il donnera rendez-vous à son public sur disque puis sur scène. Chez ce garçon prolifique, qui travaille tout le temps (douze albums parus depuis La Fossette, en 1992), tout fait sens et tout fait œuvre. Il a imprimé sa marque dans notre paysage musical, sans concession au show-biz qui « voulait faire de [lui] un chanteur de pop inoffensif », dit-il. D'ailleurs, depuis 2007, il s'édite à compte d'auteur. Ce n'est pas le cas pour ses livres, celui-ci étant le cinquième. Un vrai livre d'écrivain, où Dominique Ané raconte sans fard sa carrière, ses tribulations, ses ruptures sentimentales, avec, à la fin de chacun des 26 chapitres, le texte de la chanson s'y rapportant. C'est aussi un chant d'amour à la littérature et aux écrivains, Dominique Fabre par exemple, ou Brigitte Giraud, qui lui a mis « le pied à l'étrier de l'écriture
silencieuse ». On l'en remercie.