Jean-François Cusson : "Il faudrait mettre de côté certains paradigmes du papier"

Jean-François Cusson, directeur général de Bibliopresto. - Photo DR

Jean-François Cusson : "Il faudrait mettre de côté certains paradigmes du papier"

Jean-François Cusson tire le bilan de l’expérience québécoise qui a inspiré PNB.

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Par Véronique Heurtematte
avec Créé le 05.02.2016 à 01h00

En janvier 2012, le Québec lançait une offre de prêt numérique pour les bibliothèques dont la particularité était de reproduire la chaîne commerciale du livre imprimé. Jean-François Cusson, directeur général de Bibliopresto, l’organisme qui gère la plateforme, tire les enseignements d’un dispositif qui a permis 2,5 millions de prêts.

Jean-François Cusson - 130 structures totalisant plus de 1 000 implantations sont clientes, soit presque tout le réseau des bibliothèques publiques du Québec et du Nouveau-Brunswick. 325 000 livres ont été achetés et 2,5 millions de prêts ont été enregistrés depuis la création de ce service qui touche près de 9 % des usagers. Aujourd’hui, offrir du livre numérique en bibliothèque est devenu la norme. Le chiffre d’affaires généré par les bibliothèques se monte à 2,5 millions de dollars canadiens - quand celui des particuliers est de 7 millions - et représente une part importante des revenus du numérique pour les libraires indépendants.

A l’origine, le principal objectif était de diffuser la littérature québécoise, mais nous avions démarré avec une offre incomplète car certains éditeurs étaient réticents. Nous avons maintenant tous les éditeurs québécois importants, présents avec la quasi-totalité de leurs catalogues alimentés en temps réel, sauf ponctuellement pour certains titres sur lesquels il y a un embargo de quelques mois. Plusieurs éditeurs français ont également rejoint notre dispositif.

En effet, nous avons retenu la notion d’exemplaire, comme pour le papier. Les livres numériques peuvent être prêtés 55 fois sans limites dans le temps. Le prêt unique restreint l’offre de service mais, en contrepartie, nous avons un système simple, identique pour tous les éditeurs, et bon marché puisque le prix pour les bibliothèques est le même que celui pour les particuliers. Depuis 2012, sur 325 000 ebooks achetés, seuls 300 ont épuisé leurs crédits de prêt car les bibliothèques achètent en plusieurs exemplaires les titres les plus demandés. Quant au risque de ne pas épuiser le crédit, il est comparable aux ouvrages papier que l’on achète et qui ne sortent que trois fois.

En 2012, nous avons pris la chaîne du livre imprimé et nous l’avons introduite de manière un peu artificielle dans le monde du numérique. Il faudrait maintenant mettre de côté certains paradigmes du papier qui n’ont pas leur place dans le numérique. Par exemple, un livre publié il y a vingt ans doit-il avoir le même prix qu’une nouveauté ? Nous réfléchissons aussi à une offre complémentaire de bouquets en streaming. Mais nous avons conscience que toute évolution doit se faire dans un système avantageux pour les éditeurs car s’ils disparaissent, nous n’aurons plus de contenus à proposer. Aujourd’hui, il y a aussi pour les bibliothèques, dont certaines possèdent des catalogues de plus de 20 000 titres, de gros enjeux autour de la médiation. Comment faire vivre physiquement ces collections dans les espaces de la bibliothèque ? Un usager peut venir tous les jours et ignorer que ce service existe.

05.02 2016

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