Selon les informations transmises par le ministère de la Culture, le juge chargé du dossier pourrait rendre sa décision rapidement, et dans un sens qui ne fait pas de doute. Pour éviter une amende de plusieurs millions d’euros, la France devrait donc appliquer le taux de TVA normal sur le livre numérique, soit 20 %, au lieu de 5,5 %. Les éditeurs pourraient répercuter cette hausse sur le prix des livres numériques, ce qui casserait ce marché à peine naissant en France, ou pourraient l’absorber au prix d’une diminution de leur marge et de celle des libraires.
“Il existe donc un risque pour que la TVA sur les livres numériques revienne au taux normal de 20 % au cours du premier semestre 2015. Nous conseillons vivement à nos adhérents de se préparer à cette éventualité et de construire leur budget prévisionnel pour le deuxième semestre de l’année 2015 en intégrant ce paramètre” prévient le SNE.
La décision serait rendue au nom du principe du respect de la réglementation fiscale, car la distorsion de concurrence dont se plaignaient certains Etats n’existera plus à partir du 1er janvier 2015, date à laquelle la TVA appliquée sera celle du pays de l’acheteur, et non plus du pays ou se trouve le revendeur.
Depuis le 1er janvier 2013, la France applique sur les livres numériques le même taux que le sur le livre papier, soit 5,5 % aujourd’hui. Le Luxembourg qui avait déjà concédé un taux négocié de manière opaque avec les revendeurs implantés sur place (dont Amazon) en a profité pour officialiser un taux réduit à 3%, qui lui vaut aussi des poursuites. La réglementation de l’Union européenne considère que le livre numérique rentre dans la catégorie des services, non éligibles au taux réduit.
La distorsion de concurrence fiscale profite surtout à Amazon : actuellement, quand il vend un ebook à un résident du Royaume-Uni, premier marché européen du numérique, le cybermarchand applique une TVA de 3 %, alors qu’un libraire britannique vendant le même livre doit supporter une TVA de 20 %.
“Le SNE ne se résigne pas pour autant et poursuit activement son lobbying, aux côtés des pouvoirs publics français, pour faire modifier la directive européenne sur la TVA et ainsi éviter cette condamnation. Nous allons amplifier la mobilisation médiatique, à l’instar de l’Italie, qui préside actuellement l’Union Européenne et a lancé une vaste campagne à l’initiative de l’association des éditeurs italiens en faveur d’un taux réduit de TVA pour le livre numérique” explique le syndicat à ses adhérents.
La France défend une TVA homogène par nature de biens, en estimant qu’un livre numérique est identique à sa version imprimée et doit donc bénéficier du même taux. Lors du dernier conseil des ministres européens de la culture, l’Italie qui préside actuellement l’Union a obtenu que le sujet reste sur l’agenda de la Commission, dont le représentant a promis de s’occuper.