15 janvier > Essai France

Infranchissable. Ce serait une bonne définition de l’horizon. Céline Flécheux nous propose d’aller plus loin justement. Cette historienne de l’art, maître de conférences à l’université de Paris-Diderot Paris-7, visite ce thème en « 50 questions », selon le principe de cette collection. Et ce sont autant de petits essais stimulants qui explorent toute la richesse du sujet, des articles qui conduisent des sciences à l’utopie, en passant par les arts, la philosophie et la littérature.

L’horizon, cette « ligne circulaire où la terre semble rejoindre le ciel » selon une définition astronomique donnée au XIVe siècle, trace aussi la limite où se portent notre regard, notre connaissance, notre désir aussi. Car il est bien évident que notre compréhension du monde se fait grâce au proche et au lointain, dans une sorte d’entre-deux. L’horizon se lit aussi comme une indication de notre position, de notre rapport à l’univers. Cette limite de notre champ visuel, c’est aussi la limite de notre capacité à éprouver les extrémités du monde.

Céline Flécheux navigue avec brio entre les disciplines. Elle évoque l’horizon comme repère spatial des astronomes, l’horizon artificiel des pilotes d’avion ou l’horizon qui survient en peinture à la Renaissance après la verticalité du Moyen Age. Elle nous entraîne vers des considérations sur la perspective chère à Turner comme à Duchamp, jusque dans la création contemporaine où la place de l’artiste induit l’horizon qu’il propose ou dont il veut s’affranchir.

Dans cette rêverie savante, l’auteure s’interroge. Y aurait-il des levers et des couchers de soleil sur la mer sans l’homme, sans observateur, sans cette impression d’infini ? Peut-on trouver un équivalent de l’horizon dans les sens et dans les arts autres que visuels ? Autrement dit, un aveugle le ressent-il ? Oui, nous dit-elle, car il y aura toujours un lien au monde et au temps, sous une autre forme, parce qu’on ne peut pas être nulle part. Sur un motif léger, voici un livre profond et astucieux, dans lequel on picore, et qui parvient à nous faire changer… d’horizon. L. L.

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