Juridique

La Sofia, capitale du prêt en bibliothèque

Le stand de la Sofia - Photo Olivier Dion

La Sofia, capitale du prêt en bibliothèque

La Société française des intérêts des auteurs de l’écrit (Sofia) est en charge de la perception de la rémunération du prêt en bibliothèque. Mais que se passe-t-il lorsqu'une librairie ne lui déclare pas ses ventes ? Une récente décision du Tribunal judiciaire de Lille répond à cette question (13 Septembre 2024, RG : 23/03953).

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Par Alexandre Duval-Stalla
Créé le 15.10.2024 à 10h35

Sofia n’est pas seulement la capitale de la Bulgarie, mais également un organisme de gestion collective du droit de prêt en bibliothèque agréé par le Ministère de la culture.

En effet, la Société française des intérêts des auteurs de l’écrit (la « Sofia ») est l’organisme de gestion collective en charge de la perception et la répartition de la rémunération due au titre du prêt en bibliothèque. En effet, il résulte des dispositions des articles L. 133-1 à L. 133-3 du code de la propriété intellectuelle que lorsqu'une œuvre a fait l'objet d'un contrat d'édition en vue de sa publication et de sa diffusion sous forme de livre, l'auteur ne peut s'opposer au prêt d'exemplaires de cette édition par une bibliothèque accueillant du public. Ce prêt ouvre droit à rémunération au profit de l'auteur.

Les principaux objectifs de ces dispositions relatives au droit de prêt en bibliothèque sont les suivants :

  • permettre aux auteurs et aux éditeurs d’être légitimement rémunérés au titre du prêt de leurs livres en bibliothèque ;
  • instituer et soutenir un régime de retraite complémentaire pour les auteurs de livres (écrivains, traducteurs, illustrateurs…) ;
  • consolider l’action des bibliothèques en faveur de la lecture publique, en dispensant leurs usagers du paiement d’un droit de prêt ;
  • soutenir la chaîne du livre, en favorisant l’accès des librairies aux marchés publics.

La loi a donc, d’une part, institué une licence légale relative au prêt d’ouvrages, permettant ainsi aux auteurs et aux éditeurs de bénéficier d’un droit à rémunération en contrepartie du prêt de leurs livres par les bibliothèques et à ces bibliothèques de prêter des livres sans porter atteinte au droit d’auteur. Elle a créé, d’autre part, un régime de retraite complémentaire pour les auteurs, financé partiellement par les sommes issues du droit de prêt, et, enfin, apporté un soutien accru à la librairie par le plafonnement des rabais pouvant être consentis sur les livres vendus aux bibliothèques de prêt.

La rémunération pour le prêt des livres, au bénéfice de leurs auteurs et de leurs éditeurs, est financée en partie par l’État et en partie par les ventes de livres aux bibliothèques.
Les bibliothèques et centres de documentation assujettis au droit de prêt, ainsi que leurs fournisseurs de livres, doivent ainsi procéder aux déclarations de leurs achats ou de leurs ventes de livres auprès de la Sofia. Les fournisseurs de livres reversent, sur la base de ces déclarations, une redevance correspondant à 6% du prix public hors taxe des livres vendus aux organismes de prêt. L’État, quant à lui, verse à la Sofia une contribution calculée sur le nombre d’usagers inscrits dans les bibliothèques de lecture publique et les bibliothèques universitaires.

Une librairie défaillante dans ses obligations déclaratives

Ainsi, les organismes de prêt et les fournisseurs de livres à ces organismes doivent chaque année communiquer à la Sofia les informations relatives à leurs acquisitions ou à leurs ventes de livres. Ces déclarations permettent à la Sofia de percevoir les sommes dues par les fournisseurs, mais également de répartir très exactement les droits aux auteurs et aux éditeurs de ces livres. La répartition du droit de prêt est en effet calculée sur la base des exemplaires achetés par titre et non sur le nombre de prêts intervenus par titre.

En l’espèce, une librairie était défaillante dans ses obligations déclaratives. Pourtant, chacune des factures produites par la Sofia comportait le détail de l’ensemble des déclarations de ventes de livres effectués par les bibliothèques clientes de la librairie et de l’assiette des droits sur lesquels la rémunération est assise, conformément à la législation en vigueur. Elle a donc été légitiment condamnée à payer les droits dus ; le tribunal rappelant que la Sofia était le seul organisme de gestion collective habilité à percevoir et répartir les redevances provenant de l’exercice du droit de prêt public, à avoir qualité à agir au nom de l’intérêt collectif de tous les auteurs et éditeurs qui doivent recevoir une rémunération au titre du droit de prêt. Ces derniers sont nécessairement spoliés matériellement et moralement en l’absence de perception des rémunérations qui leurs sont dues au titre du droit de prêt sur la vente de leurs œuvres.

Alexandre Duval-Stalla

Olivier Dion - Alexandre Duval-Stalla

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