Le destin de Camille Vollot a basculé en 2001, juste après le 11-Septembre, quand Antoine, son aîné de deux ans, s’est suicidé, à l’âge de 19 ans. Tandis que le premier-né, le très raisonnable Romain, patron catholique traditionaliste (on est en terre vendéenne, près de Cholet), reprend avec succès les rênes de l’entreprise familiale créée par leur père Jean-Pierre, Vollot Viande, le cadet, après avoir été boucher, se lance dans la Louve, une coopérative paysanne fondée sur la permaculture et l’agroforesterie, une espèce de laboratoire agroécologique pour les temps futurs. Personnage fragile, il est soutenu dans sa démarche par Victoire, sa femme, agrégée d’histoire, dont l’amour résiste à toutes les épreuves. Par exemple quand Camille, crédule et trop confiant, se laisse associer à Raoul Sarkis, "milliardaire" mythomane et vrai escroc, mégalo, vulgaire, "beau comme Crésus" et doté d’un culot monstre, dans l’aventure du Pavillon des Horizons (dit PaHo). Un concept révolutionnaire et a priori séduisant, inspiré de l’Eataly de Milan. Sarkis a racheté une ancienne usine rue du Roule, dans l’ancien ventre de Paris, et veut y implanter à la fois des restaurants gastronomiques vertueux (approvisionnés par la Louve, justement), mais aussi une galerie, des boutiques, des lieux de spectacle. Le problème, c’est qu’il n’a pas un sou vaillant, qu’il mène un train de nabab en faisant de la cavalerie financière, qu’il a des amitiés plus que douteuses (M. Jin de la mafia chinoise, par exemple), et que le chantier prend de plus en plus de retard. Seuls deux ou trois restaurants sont opérationnels.
Pas longtemps. Bien vite, c’est la catastrophe, le dépôt de bilan frauduleux, qui risque d’entraîner dans le gouffre Camille et ses amis écoagriculteurs. Heureusement, Victoire est là, qui n’a jamais pu supporter Sarkis (lequel ne s’appelle d’ailleurs pas comme ça) depuis le début, ainsi que la famille Vollot, et même Anne-Marie Perrault, la pionnière de la permaculture, qui a formé le jeune homme, complètement perdu après le suicide de son frère.
Futé, Bizon surfe sur le contexte écologique actuel, les problèmes soulevés à la COP 21, et s’inspire d’une affaire réelle récente, sans jamais la nommer, La Jeune Rue, pour composer une espèce de thriller économique contemporain, assez glacial, où il laisse transparaître quelques opinions personnelles plutôt tranchées. J.-C. P.
