Avec Le trille du diable, Nabil Malek signe un cinquième roman magistral qui nous plonge en plein cœur de la République Démocratique Allemande des années 1970.

Un roman historique

Le trille du diable est une épopée passionnante entre fiction et Histoire, où l’on suit les péripéties d’un officier égyptien en quête de justice et de vérité qui plonge dans la démence meurtrière de la République Démocratique Allemande. Victorieux de la guerre des Six jours, Amin El Foda se retrouve en formation auprès de la Stasi. Envoûté par le régime marxiste et en phase avec ses idéaux, le protagoniste mène une vie tout d’abord idyllique, qui s'avérera par la
suite semée d’embûches et de désillusions, le menant tout droit à la déchéance. Tout bascule lorsqu’une femme est assassinée : il s’agit de son amante. Amin El Foda veut retrouver son meurtrier. Dans la lourdeur berlinoise des années soixante-dix, sa vie sombre peu à peu dans l’enfer, jusqu’à être traqué et devoir fuir. Ce roman nous fait traverser les horreurs de l'Allemagne de l'Est et le déclin d'une époque, par le prisme de cet homme en proie à ses démons.

La Guerre des Six jours et les services d’espionnage

Le livre s’ouvre avec la Guerre des Six jours. Pour Nabil Malek, quand l’Égypte a perdu la guerre en 1967, ce n’en était pas vraiment une : la Guerre des Six jours aurait en fait duré six minutes, soit le temps qu'il a fallu à l'armée israélienne pour anéantir les avions égyptiens. Comment était-il possible que les Israéliens sachent exactement où était la position des avions ? Nasser (l’ancien président d'Égypte, ndlr) avait alors dit : « Nous avons été trahis ». Ce qui nous mène tout droit aux services de renseignements. Rappelons les faits historiques : en 1965, la Ligue arabe se réunit au Maroc pour planifier la guerre contre Israël. Cette conférence est infiltrée par les services de renseignement israéliens. Ils avaient ainsi les plans exacts de ce qui allait se passer ce 11 juin 1967 et savaient où seraient les avions. Cela a été prouvé lorsqu’un homme, directeur général du Mossad à cette époque, est passé à des aveux tardifs il y
a trois ans. Nabil Malek passe ainsi plusieurs années à écrire ce livre avant tout pour rétablir une vérité.

Des partitions musicales et des messages cachés…

Son titre, Le trille du diable, fait référence à la Sonate du compositeur Giuseppe Tartini. Ornement musical imaginé au XVIᵉ siècle, le trille consiste à alterner rapidement deux notes distantes d'un ton ou d'un demi-ton. Lorsque la Stasi et ses alliés communiquaient, il y avait toujours un système secret pour faire passer les messages.
Comment ont-ils fait ? Ils se sont, entre autres, servis de partitions musicales, dans lesquelles ils dissimulaient des microfiches. Les messages ainsi cachés dans les notes de musique, vous sortiez de Berlin avec une partition et le tour était joué.

Un anti-héros aux idéaux malmenés

Amin El Foda est l’anti-héros par excellence, en proie à de grands paradoxes : agent infiltré et fier de l’être, il finit par faire un constat d'aliénation générale au sein de la RDA. Comment faire face lorsque les convictions s’écroulent, que l’on réalise que tout n’était qu’un mirage ? Dans son processus d’écriture, Nabil Malek fait acte de reconstitution identitaire, à l’instar de son protagoniste, Amin El Foda. À la fois fiction et reconstruction historique, ce récit est révélateur d’une réalité tout en questionnant le thème de la représentation de soi. La multiplicité des points de vue de son protagoniste le mène à la prise de conscience de ce qui se dissimule sous les apparences. La reconstruction de l’humain prend alors toute sa place dans un contexte historique tristement célèbre. Nabil Malek signe une intrigue un roman résolument historique, qui donne des informations inédites sur cette période sombre de l’Allemagne.

Et c'est ici que l'œuvre devient une véritable mine d'or. En effet l'auteur se sert du roman pour nous offrir des informations extrêmement précises sur des faits de guerre très ou trop peu connus du grand public. Le tout sous forme de révélation que nous avons peine ici à croire. Et pourtant tout est vrai et vérifiable. L’attaché de presse de l'auteur nous promettait un livre puissant et dérangeant. Nous avons découvert une œuvre...remarquable. Bravo à cet auteur pour cet essai réussi.

Les impliqués Éditeurs https://www.letrille-dudiable.com/