L'écrivain espagnol Juan Marsé, narrateur de sa ville de Barcelone, est décédé samedi à 87 ans, a annoncé dimanche son agence littéraire Balcells. "Nous regrettons profondément la mort de Juan Marsé (Barcelone, 8 janvier 1933 - 18 juillet 2020). Repose en paix, cher Juan", a publié son agence sur Twitter.
L'auteur catalan avait reçu en 2008 le prix Cervantès, considéré comme le Nobel des lettres hispaniques, pour son œuvre contant la ville de Barcelone, théâtre d'une enfance au temps du franquisme, sans cesse réinventée dans ses livres. En recevant le prix Cervantès, il avait déclaré être un « amoureux inconditionnel de la fiction ». Un fiction qui, selon lui, a « plus de poids et de solidité que le réel, plus de vie propre et plus de sens ».
"La littérature est un règlement de comptes avec la vie" qui est rarement comme on l'espérait, disait ce citadin au visage buriné et au regard noir tour à tour ironique et mélancolique, auteur de quinze romans en près de soixante ans.
Ouvrier en joaillerie, il écrit son premier roman (Enfermés avec un seul jouet, Gallimard) à l'âge de 24 ans pendant son service militaire. Venu d'un milieu prolétaire, une exception dans la littérature catalane à l'époque, il ne cesse de raconter Barcelone, sous toutes ses facettes politiques et dans sa dualité culturelle. Lui-même parlait catalan en famille et écrivait en castillan.
Corriger le réel
Lauréat de plusieurs prix majeurs dans le monde hispanique, et notamment le prix Planeta en 1978, le prix européen de littérature en 1994 ou encore le Prix national de narration en 2001, il est l'auteur d'une trentaine d'ouvrages (fiction, jeunesse, nouvelles, contes, poésie, essais...). Amoureux du cinéma (il a écrit quelques livres sur le sujet), ses romans ont été régulièrement adaptés. Vicente Aranda a transposé quatre de ses fictions sur grand écran.
En France, son œuvre traduite a essentiellement été publiée ou rééditée par Christian Bourgois: L'Obscure Histoire de la cousine Montse, Teresa l'après-midi, Adieu la vie, adieu l'amour, Un jour je reviendrai, Boulevard du Guinardó, L'Amant bilingue, Les Nuits de Shanghaï, Des lézards dans le ravin, Chansons d'amour au Lolita's Club, Calligraphie des rêves, Cette putain si distinguée...
"Si l'on écrit, c'est bien qu'on ne se satisfait pas de ce qui existe. On essaie de corriger le réel, d'en donner d'autres versions" disait-il pour expliquer sa détermination à faire vivre des personnages oubliés de l'Histoire ou à donner une version des faits loin de la propagande officielle.