Entre 2016 et 2019, un auteur percevant exactement le même montant de droits a vu ses revenus amputés de 8,6 % en raison de la modification du régime de prélèvements obligatoires, s'il n'était pas affilié à l'Agessa et échappait ainsi au précompte de sa cotisation vieillesse, selon le dernier baromètre de la Scan. La normalisation en vigueur depuis le 1^er janvier 2019 prépare mieux la retraite des auteurs en activité, au prix de difficultés actuelles, pour ceux dont les revenus permettent à peine une projection vers l'avenir. Le futur système de retraite universelle est aussi porteur de questions si son principe est mis en œuvre sans aménagement.

Cette situation explique en partie la tension autour du partage de la valeur dans la chaîne du livre, au cœur des Etats généraux du livre organisés le 4 juin. La hausse des droits perçus qui permettrait de compenser celle des prélèvements reste soumise aux aléas d'un marché global incertain, et ne relève finalement que des succès individuels : 8 % des auteurs déclarent que leur situation s'est améliorée au cours des dernières années, selon la Scam.

Une simulation à l'aide d'un des outils de calcul créés par les sociétés d'auteur fait apparaître cette évolution prévisible dès 2016, année à partir de laquelle les représentants de ces sociétés ont tenté d'alerter les pouvoirs publics. Un auteur qui aurait perçu 8 703 euros en 2016, correspondant à la valeur de 900 Smic horaires bruts, montant minimum pour accéder au régime social des artistes-auteurs, ne conserverait plus que 7 208 euros cette année, s'il avait jusqu'alors différé le règlement de ses cotisations de retraite. Faute d'être avertis par l'Agessa, nombre d'auteurs se trouvaient dans cette situation avant le précompte mis en œuvre cette année, selon les représentants de leurs associations.

La baisse a démarré doucement en 2017, en raison d'une petite hausse de la cotisation maladie. Elle s'est poursuivie en 2018 avec celle de la CSG (compensée ensuite) et le précompte de la cotisation retraite non plafonnée (0,4 %), puis celle de la retraite plafonnée, le prélèvement le plus important. Les auteurs qui s'en acquittaient déjà en 2016 voient quand même leurs revenus baisser en raison de la hausse de la cotisation de retraite complémentaire. La plupart d'entre eux optaient pour le forfait minimum, de 439 euros (soit 5 % de 8 703 euros), supprimé pour un taux proportionnel, de 7 % cette année et de 8 % l'an prochain, soit 696 euros, pris en charge à 50 % par la Sofia. Là encore, le but est d'assurer une retraite plus décente aux auteurs. Hervé Hugueny