Dématérialisation

Nous avons voulu comprendre pourquoi les libraires, qui sont à la recherche d’économies et de gains de productivité, ne se sont pas encore emparés des factures dématérialisées", explique Véronique Backert. La directrice générale de Dilicom a chargé Bertrand Picard, ex-directeur du livre de la Fnac et ex-directeur commercial et logistique de Gibert Jeune, devenu consultant indépendant en librairie, de mener une étude auprès des librairies indépendantes sur la circulation et le traitement des factures fournisseurs. Menée entre fin 2017 et début 2018, celle-ci mêle un volet qualitatif, réalisé auprès d’une quinzaine de libraires et des principaux distributeurs, à un autre quantitatif, avec l’envoi à 1 800 libraires clients de Dilicom d’un questionnaire auquel près d’un quart, soit 441, ont répondu.

Potentiel insoupçonné

Au terme de cette enquête dense et technique, Véronique Backert constate que "les libraires ne soupçonnent tout simplement pas le potentiel de ce service qui leur permettrait pourtant de gagner beaucoup de temps sur des tâches administratives qu’ils assument souvent eux-mêmes". Contrairement aux idées reçues, la facture dématérialisée agit à plusieurs niveaux. Elle permet non seulement de supprimer la saisie comptable de centaines de documents chaque mois, mais surtout de simplifier les opérations de contrôle qui passent aujourd’hui par un rapprochement manuel entre bons de livraison et factures ainsi que bons de retour et avoirs. Des tâches fastidieuses et chronophages que le libraire ne délègue pas forcément et que parfois, faute de temps, il se voit contraint de négliger.

D’après l’étude, près d’un tiers des libraires interrogés consacrent au moins quatre heures par semaine au contrôle des factures, et un quart au moins trois heures par semaine au contrôle des avoirs. Sachant que ces temps se cumulent, le nombre d’heures passées par certains libraires à effectuer ces tâches administratives grimpe vite. Plus que des économies sonnantes et trébuchantes, l’utilisation de factures électroniques apporterait au libraire du temps pour des fonctions commerciales en magasin auprès de ses clients.

La prise de conscience de tels gains de productivité devrait créer des attentes chez les libraires, estime Véronique Backert, qui entend engager un travail de réflexion avec eux et avec les prestataires de logiciels pour établir les spécifications nécessaires à la bonne intégration des factures électroniques dans les systèmes de gestion et de comptabilité.

Suivi de trésorerie

Au Syndicat de la librairie française (SLF), Hélène Clemente, chargée de mission, salue "l’intérêt de l’étude, orientée sur les processus de travail en librairie. On voit qu’aujourd’hui, avec les documents papier, les pratiques sont différentes. En montrant les gains de productivité potentiels liés à la dématérialisation des factures, l’étude devrait accélérer l’acceptation du service par les libraires." Au-delà, Sophie Saint-Marc, déléguée générale de l’Association des librairies informatisées et utilisatrices de réseaux électroniques (Alire), envisage de "possibles évolutions dans les façons de travailler avec l’exploitation automatique de certaines données, autorisant par exemple un suivi des mouvements financiers et en particulier de la trésorerie".

Pour Véronique Backert, "l’objectif est de débuter en juin un travail de réflexion qui permettra ensuite aux SSII de développer les fonctionnalités attendues et de les proposer courant 2019". L’obligation légale faite à toutes les entreprises fournissant, dans le cadre de marchés publics, les collectivités territoriales d’émettre des factures dématérialisées, au plus tard le 1er janvier 2020, constitue un levier d’accélération. Car, note Véronique Backert, "quand on sait émettre, on sait recevoir".

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