4 novembre > Roman Espagne > Manuel Arroyo-Stephens

"La mémoire est une triste chose, à toujours se nourrir de ce qui a été perdu." Il n’est donc pas nécessaire d’en rajouter, c’est-à-dire d’en parler tristement. C’est pourquoi les six textes qui composent Parmi les cendres, le recueil de mémoires vagabonds du libraire et éditeur espagnol Manuel Arroyo-Stephens (son deuxième livre traduit en français après l’hilarant et érudit Contre les Français, paru au début de l’année chez Exils), n’est dédié qu’à la curiosité, à un hédonisme vrai, à une gourmandise de vie qui englobe les moments où celle-ci s’achève.

Grand bibliophile, figure, d’une impeccable discrétion, de la vie éditoriale et intellectuelle espagnole, Arroyo-Stephens dit lui-même qu’il est "plus espagnol qu’une tortilla de patatas", ce qui dans sa bouche veut dire sans doute qu’il aime les secrets, les taureaux, la compagnie choisie des hommes et la solitude. Il prétend aussi avoir mis plus de trente ans à écrire son livre, servi ici par une traduction virtuose de Serge Mestre. Comme son titre l’indique, il n’y est question que de mort, ou plutôt de morts. Andrés Trapiello évoque à son propos les morts de Joyce dans Les gens de Dublin. C’est bien à cette hauteur-là que s’élève la prose hiératique autant qu’enchantée d’Arroyo-Stephens, qu’il évoque en guise de chers disparus, les cérémonies secrètes de la corrida, la poussière des grimoires, José Bergamín qu’il suit tout au long de ses chemins de traverse, ou ses propres parents. Une cérémonie des adieux en habit de fête. Olivier Mony

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