Pierre Mikaïloff est tombé dans la musique quand il était petit, et donc dans le rock’n’roll "made in US". Guitariste, compositeur, critique de rock, documentariste, auteur de fictions musicales, il a publié une vingtaine de livres, la plupart consacrés à la musique, à ses artistes ou groupes favoris. On lui doit en particulier un précieux Beatles pour les nuls (First, 2013).
Le voici qui s’adonne aux joies de la fiction, dans un recueil de dix nouvelles nourries de ses deux passions, la musique et les Etats-Unis. Des histoires assez sombres, déjantées, avec lesquelles il s’amuse lui-même à saboter sa mythologie, à briser son rêve. Ainsi, dans "Time waits for no one", voit-on un Keith Richards gâteux, embauché par charité pour enregistrer une publicité, ne même plus reconnaître Mick Jagger, son complice de toute une vie. Il ne faudrait pas vieillir. Sinon, ses autres personnages, fictifs, sont tous des paumés bizarres, embarqués dans des histoires loufoques et-ou sanglantes, racontées le plus souvent à la première personne, ce qui plonge tout de suite le lecteur au cœur de l’action et dans la tête du "héros", plutôt un loser. Comme ce jeune gars malchanceux de Granville qui finit en prison pour avoir participé à un trafic d’immigrants mexicains ; ou ce Simon, patron d’un théâtre érotique minable de Brooklyn, qui, croyant jouer au plus fin, se trouve arnaqué par deux voyous à capuche ; ou encore ce Frenchie, dans la nouvelle finale, qui, à la recherche d’Elvis, doit affronter des revenants, des succubes, et finit par tomber sur Tanita Tikaram, "tordant sa sobriété". Le livre est tordant, lui aussi, original et savoureux.
Jean-Claude Perrier