16 mars > Jeunesse France > Orianne Charpentier

Rage, drôle de nom pour une jeune fille ! C’est sa grande amie, Artémis, qui en a eu l’idée. Une compagne d’infortune, rencontrée dans un foyer pour migrants et très vite devenue son unique famille. Depuis qu’elle et les siens ont dû quitter du jour au lendemain leur pays en proie aux violences, Rage ne peut plus prononcer son vrai nom. Son nom d’avant, son nom d’enfance, reste comme terré au fond de la gorge. Il charrie trop de malheurs, trop de souvenirs.

Le lecteur ne saura quasiment rien de son pays d’origine, ni des raisons qui ont obligé sa famille à fuir, ni de la litanie désormais bien connue des maux qui suivent, deuil, péril, exil, foyers, etc. La voilà seule en France, sans repères ni famille. Tout homme qu’elle croise est un agresseur potentiel. Rage la bien nommée se méfie de tout ce qui bouge. Aussi, quand Artémis l’invite à une fête, elle demeure dans le jardin, recluse, mutique. Sur le qui-vive, malgré les bières et les clopes. Quand un chien déboule, blessé à mort après avoir été maltraité, elle est touchée au cœur. Son unique vœu sera désormais de sauver la peau de cet animal. Il en va de sa propre survie. De cette nuit naîtront à la fois le cauchemar et la rédemption. Orianne Charpentier ne tombe dans aucun des écueils propres à ce genre de récit. Amateurs de scènes poignantes et de bons sentiments, passez votre chemin.

Avec une infinie pudeur, l’auteure fait vivre ce personnage blessé, qui s’arrime à la vie comme à un mât déglingué. Le récit est sobre, tendu comme un arc. Pas un mot de trop, nulle métaphore facile et inutile. C’est sec, c’est fort. C’est beau. Fabienne Jacob

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