Édito par Fabrice Piault, rédacteur en chef

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A l’inverse de la rentrée littéraire, phénomène avant tout qualitatif visant à la découverte et à la consécration de nouveaux talents, la rentrée bande dessinée s’est longtemps appuyée sur un solide contingent de locomotives des ventes pour la fin d’année. Il est vrai que le secteur a le privilège de pouvoir aligner chaque automne sur les tables des libraires 30 à 35 nouveautés tirées à 100 000 exemplaires ou plus. La rentrée 2017, où Astérix et Titeuf s’apprêtent à mener le bal, ne faillira pas à la règle. Pourtant, tandis qu’en littérature un nombre croissant de poids lourds viennent lester un automne qui, économiquement, ne peut plus reposer seulement sur les espoirs de grands prix, les éditeurs de bande dessinée s’efforcent à l’inverse de conforter le leur par une programmation plus audacieuse. A la rentrée littéraire s’adjoint une rentrée de littérature graphique.

Cet automne s’annonce particulièrement riche. Des auteurs confirmés y publient des livres puissants, tel Cosey, pour la première fois chez Futuropolis avec Calypso, une histoire d’amour en noir et blanc, ou Jean-Louis Tripp, qui entame avec Extases, chez Casterman, le récit de sa vie sexuelle des origines à nos jours, en trois forts volumes, tandis que Rue de Sèvres publiera la dernière œuvre de Jirô Taniguchi, La forêt millénaire, que le grand auteur japonais a réalisée peu avant sa mort. Les éditeurs ont aussi programmé de jeunes auteurs prometteurs, tels Jérémie Moreau pour La saga de Grimr (Delcourt) ou, traduit de l’américain, Tillie Walden pour Spinning (Gallimard BD).

Loin de concurrencer la littérature, ce programme graphique pourrait bien au contraire renforcer les synergies entre les deux secteurs. Ceux-ci partagent une partie de leurs publics, et la BD n’en finit pas de jeter vers le roman de nouvelles passerelles. Les adaptations d’œuvres littéraires en bande dessinée continuent de se multiplier, avec dans les semaines qui viennent celles du Joueur d’échecs de Stefan Zweig, du Premier homme d’Albert Camus, de L’automne à Pékin de Boris Vian ou de Balzac et la petite tailleuse chinoise de Dai Sijie. Des biographies de Nerval, Istrati et Jack London sont annoncées, et un Voltaire amoureux de Clément Oubrerie (Les Arènes). Des auteurs tentent même des variations autour de classiques comme La mille et unième nuit chez Soleil ou, chez Glénat, inspiré de Choderlos de Laclos, un Liaisons dangereuses : préliminaires. Des preuves d’amour.

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