Suite aux premières audiences publiques du procès opposant HarperCollins, John Wiley, Pneguim Random House et Hachette à Internet Archive, détenteur de la bibliothèque numérique gratuite Open Library, le juge américain John G.Koeltl a donné raison aux éditeurs plaignants. Dans un avis de 47 pages révélé vendredi 24 mars, le magistrat a estimé qu'Internet Archive a violé les droits d’auteur de 127 œuvres des quatre éditeurs, en scannant et en prêtant les ouvrages soumis à une protection intellectuelle, dans le cadre du prêt numérique contrôlé.
Pas de redevance, pas d’autorisation de distribution
Le juge a conclu que l’Internet Archive n’offrait pas son propre contenu mais se contentait de mettre à disposition des internautes des œuvres dérivées, c’est-à-dire des copies numérisées à partir de livres physiques achetés ou donnés.
Au total, l’Internet Archive revendique deux millions de copies tombées dans le domaine public et environ 3,6 millions de documents soumis à des droits d’auteur. Ces derniers sont disponibles à l’emprunt d’après le protocole du prêt numérique contrôlé, notamment utilisé par les bibliothèques conventionnelles, et qui permet la consultation unique et non simultanée d’un exemplaire. Or, contrairement aux bibliothèques, l’Internet Archive ne se procure pas de licences électroniques accordées par les éditeurs en échange d’une redevance. D’après le juge, le prêt des copies numérisées se fait donc sans autorisation et contribue à « supplanter la place des éditeurs sur le marché ».
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Le « bien public », un argument insuffisant
L’argument du « fair use » (doctrine prévoyant des exemptions de propriété intellectuelle sous certaines conditions) avancé par la défense, au nom des activités sans but commercial de l’Internet Archive, a lui aussi échoué. Pour le juge Koeltl, « la non-rétribution financière de ce procédé ne correspond à aucun droit et risque d’éviscérer les droits des auteurs et des éditeurs à tirer profit de la création et la diffusion de produits dérivés de leurs œuvres protégées ».
De la même façon, le magistrat a balayé l’argument du « bien public », c’est-à-dire l’idée selon laquelle les activités de l’Internet Archive participeraient à la démocratisation et à l’accessibilité du savoir au plus grand nombre. A l’inverse, la justice a estimé que « ces prétendus avantages ne sauraient l’emporter sur le préjudice subi par les éditeurs ».
Les responsables de l’Internet Archive ont annoncé, dans un communiqué, vouloir faire appel au verdict, jugeant que la décision « freine l’accès l’information à l’ère numérique ».