21 septembre > Western Canada > Clifford Jackman

Paradoxalement, dans la mythologie écrite ou filmée des Américains, pourtant le peuple le plus bigot et le plus moralisateur du monde, les héros sont souvent les méchants, les voyous, les hors-la-loi, les tueurs. Dans le western en particulier. Jesse James, Billy the Kid, les frères Dalton en sont quelques tristes exemples, aux côtés desquels désormais Augustus Winter avec sa bande, les "héros" de Clifford Jackman, méritent de prendre toute leur place. Il est vrai que leur pays s’est construit sur une guerre civile d’une atrocité inouïe, et sur un génocide minutieusement exécuté. Les deux servent d’ailleurs d’arrière-plan à La famille Winter.

En 1864, en Géorgie, Winter, fils de pasteur totalement perverti, Quentin Ross, garçon de bonne famille devenu tueur psychopathe, et leurs acolytes débiles, les frères Empire, soi-disant bummers de Sherman, c’est-à-dire "escarmoucheurs" sous les ordres du général nordiste, ont commis les pires exactions dans le Sud vaincu. Ensuite, déserteurs, ils ont échappé de peu à la cour martiale. On les retrouvera brigands de grand chemin déguisés en membres du Ku Klux Klan, mercenaires à Chicago recrutés par les Républicains pour battre le maire démocrate par tous les moyens, puis auteurs de massacres d’Apaches, en 1881, auquels Geronimo échappe de justesse. Il faudra la trahison du métis Bill Bread, l’acharnement de Matt Shakespeare, employé de l’Agence Pinkerton, pour qu’enfin la bande soit éliminée, en 1891. Quant à Winter lui-même, on ne sait pas trop.

Quoique canadien, Clifford Jackman connaît par cœur les codes du genre, il en joue, à la fois fidèle et inventif. Chez lui, la boucherie se veut métaphysique, et la cavale une forme de résistance à la civilisation. Le regretté Sergio Leone en aurait tiré un western impeccable.

Jean-Claude Perrier

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