Pour la filière livre, le bilan est sans appel : la pratique de la lecture est en recul constant depuis près d’un demi-siècle. En 2018, 62% des Français de 15 ans et plus avaient lu au moins un livre au cours de l’année, soit 11 points de moins par rapport à 1988 et la proportion la plus faible observée depuis le début des années 1970. La part de lecteurs assidus dans la population, ceux qui ont lu 20 ouvrages ou plus au cours de l’année, chute de 28% en 1973 à 15% en 2018.
La lecture de bandes dessinées, comptabilisée dans une catégorie distincte de la lecture globale dans le rapport, ne fait pas exception. Seulement 20% des Français avaient lu au moins une BD en 2018, contre 41% en 1988.
Vieillissement et décrochage
Le recul global de la lecture en France s’explique par deux phénomènes cumulés, soulignent les auteurs de l’enquête. Le poids croissant des catégories âgées, moins lectrices, dans la population, d'une part - la lecture est traditionnellement une pratique qui décline avec l’âge, notent les statisticiens. Et la baisse de la lecture au sein des générations récentes, d'autre part, perceptible chez les générations de jeunes nées après 1965.
Cet écart se creuse même fortement à partir des générations nées après 1975, qui lisent deux, voire trois fois moins que leurs parents au même âge qu’eux. Le décalage est tel, souligne le rapport, qu’il a pour effet d’inverser la relation classique entre âge et pratique de la lecture : "aujourd’hui, les jeunes sont moins souvent lecteurs que leurs aînés [alors] qu’il y a vingt ans, c’était au contraire les jeunes qui étaient les plus nombreux à lire", remarquent les enquêteurs.
Féminisation
Autre enseignement : le lectorat français s’est nettement féminisé au cours des 40 dernières années. Ou plutôt, les hommes ont sensiblement décroché de la lecture. Seulement 52% des hommes avaient lu au moins un livre en 2018, contre 73% en 1981. La part de lectrices chez les femmes est, sur la même période, restée relativement stable, aux alentours de 70%.
La pratique de la lecture assidue reste en outre toujours grandement déterminée par la catégorie sociale et le niveau de diplôme. Les cadres et les diplômés du supérieur étaient, en 2018, environ 3 fois plus nombreux à lire plus de 20 livres par an que les ouvriers, employés et titulaires d'un certificat d'études primaire ou diplôme inférieur.
Les disparités liées au lieu de résidence se sont, en revanche, amplement résorbées en près de 50 ans, soulignent les auteurs. En 1973, les habitants de grandes agglomérations étaient 2,5 fois plus nombreux à lire 20 livres ou plus par an que les habitants de zones rurales, tandis qu'en 2018, ce déséquilibre disparait presque totalement.