Dans le Comité d’action étudiants-écrivains fondé le 18 mai 1968, il y avait Marguerite Duras, Daniel Guérin, Jean-Jacques Lebel, Dionys Mascolo et Maurice Blanchot. L’homme qui eut des sympathies pour l’extrême droite dans les années 1930 se retrouve sous les drapeaux rouges et noirs de la Sorbonne occupée. Il prend fait et cause pour ce mouvement au point de délaisser son œuvre.
Jean-François Hamel nous éclaire à la fois sur Mai 68 vu à travers une bande d’écrivains et sur un épisode de la vie de Maurice Blanchot. Ce professeur de littérature (université du Québec à Montréal) parvient à immerger le lecteur dans une ambiance subversive. L’être se révèle à la lumière du néon et le langage politique s’affiche sous l’éclairage cru des rues.
Marguerite Duras avait raconté cela à chaud dans un article paru dans Les Lettres nouvelles de Maurice Nadaud. En fouillant dans les archives, notamment celle de l’Imec, et en faisant de Blanchot le pivot de cette aventure, Jean-François Hamel fait apparaître ce qui sourd derrière la contestation. La guerre d’Algérie, la répression meurtrière d’octobre 1961, la violence policière contre les manifestants de Charonne de 1962 ressortent comme des frustrations trop longtemps refoulées.
Blanchot s’identifie parfaitement à ceux que le ministre de l’Intérieur qualifie de "pègre". L’écrivain du livre impossible se retrouve sur le terrain de l’insurrection introuvable. Après la dissolution du Comité en 1969, il revient à l’écriture. Cet essai bref et incisif révèle que cet épisode ne fut pas qu’une parenthèse chez celui qui voulait révolutionner la révolution. L. L.