12 juin > Essai Italie > Pic de la Mirandole

Un philosophe qui conclut est un philosophe qui s’est déjà posé toutes les questions. Jean Pic de la Mirandole (1463-1494) l’a fait. A 23 ans, il ne manque pas de prétention. A la cour de Laurent de Médicis, il veut être reconnu comme le plus grand penseur de son temps. Dans ce but, en 1486, après neuf ans de lectures en grec, hébreu, arabe et chaldéen, il publie en latin Les 900 conclusions. Par thèmes, il donne en quelques lignes sa position : "Tout ce qui existe dans un genre peut être détruit." Dans un mouvement qui mêle le faste à l’érudition, Pic franchit un cap. Il rêve d’une synthèse entre Platon et Aristote, et proclame la scolastique médiévale dépassée.

Pour assurer la diffusion de ses idées, il envisage une dispute publique, sous l’égide du pape Innocent VIII. Sauf que celui-ci, proche de Torquemada, est agacé par le présomptueux trublion. Une commission examine Les 900 conclusions et en condamne 13. Pic prend la mouche et rédige une Apologie pour réaffirmer ses positions. Excédé, le pape interdit la réimpression du livre sous peine d’excommunication et demande que tous les exemplaires soient brûlés. Pic s’enfuit en France puis revient à Florence où il termine sa vie dans l’étude de la cabale.

On apprend tout cela dans l’introduction historique de Louis Valcke, le spécialiste mondial des études sur Pic de la Mirandole (Les Belles Lettres, 2005), décédé en 2012 alors qu’il travaillait sur cette édition. Delphine Viellard a non seulement retraduit le texte, mais elle donne pour chaque "conclusion" les éléments pour comprendre un texte qui, sinon, resterait bien souvent abscons.

Laurent Lemire

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