2010

Fallait-il publier ce manuscrit original, version uncut - et donc inédite - de ce qui deviendrait Parlez-moi d'amour, après que son éditeur en eut coupé plus de la moitié ? Si j'en juge par l'accueil passionné qu'il a reçu en France, la réponse est oui, mille fois oui. D'autant que ce geste éditorial inaugurait la parution des oeuvres complètes du "Tchekhov américain". C'était le moment ou jamais de rappeler à des lecteurs parfois amnésiques la place qui revient à Carver, aux côtés d'Hemingway, Babel ou Salinger. Pour cela, il importait que le texte fût traduit et édité de manière impeccable, et sa publicité fermement assurée. Nous nous y sommes employés, sans ménager nos efforts. L'avenir dira si nous avons réussi. C'est en commentant en public l'une des nouvelles de ce recueil que je me suis rappelé en quoi consiste, à mes yeux, l'essence de son art : l'introduction du mystère dans les comédies et les drames, petits et grands, qui marquent nos existences. Flannery O'Connor avait inventé pour cela une formule magnifique : "le mystère et les moeurs". Ces mots pourraient être son épitaphe, gravés sur la pierre qui se dresse dans le petit cimetière de Port Angeles où il repose, bercé par le grondement du Pacifique nord.

12.02 2016

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