22 février > Histoire Etats-Unis > Bart D. Ehrman

Les Evangiles ont été écrits entre quarante et soixante ans après la mort de Jésus par des gens qui ne l’ont pas connu, qui ne vivaient pas en Palestine et qui ne parlaient pas la même langue. Comment ces auteurs ont-ils fait ? C’est le sujet de l’enquête passionnante de Bart D. Ehrman qui s’attache à la manière dont il a été fait "mémoire" de Jésus.

Pour cela, il interroge les disciplines qui s’intéressent aux différentes formes de mémoire (psychologie cognitive, sociologie, anthropologie) susceptibles d’expliquer comment les premiers chrétiens se sont rappelé, ont transformé et inventé leurs histoires du Sauveur.

Ehrman rappelle que les Evangiles ne sont pas les comptes rendus sténographiques de ce que Jésus a fait et dit. Ils sont l’aboutissement d’une "chaîne de mémoire" qui comprend la mémoire individuelle et la mémoire collective. Dans cette construction, les témoins oculaires sont-ils fiables ? Qu’est-ce qui change et qu’est-ce qui ne change pas au fil des versions ?

Bart D. Ehrman aborde toutes les questions avec clarté, sans jamais quitter la critique textuelle du Nouveau Testament dont il est un spécialiste à l’université de Caroline du Nord. Il explique aussi le rôle fondamental de la culture orale dans cette mémoire collective qui ne fait pas que transmettre.

En puisant dans sa connaissance des textes antiques, chrétiens ou apocryphes, il révèle les souvenirs fragiles des premiers chrétiens envers la figure de Ponce Pilate, par exemple, ou ceux de l’apôtre Pierre vu comme un faiseur de miracles. Il explique pourquoi Paul ne donne pas plus d’informations sur Jésus et pourquoi les Evangiles de Matthieu, Marc, Luc et Jean sont anonymes.

Bart D. Ehrman est un habitué de la liste des meilleures ventes du New York Times. On comprend aisément pourquoi car, comme dans Les christianismes disparus (Bayard, 2007), il met à la portée du grand public les recherches théologiques savantes.

"Les premiers évangiles chrétiens sont infiniment plus que des sources historiques. Ce sont les souvenirs des premiers chrétiens sur celui qu’ils considéraient comme la personne la plus importante de toute l’humanité !" Confrontés à la réalité historique, ils apparaissent déformés comme le sont nos propres souvenirs lorsque nous les confrontons à ceux des autres. C’est aussi leur fragilité qui en fait la valeur. L. L.

Les dernières
actualités