Né à Oviedo, capitale des Asturies, Natalio Grueso a fait carrière dans la gestion culturelle et dans les relations internationales, ce qui l’a conduit à beaucoup voyager, tout comme son héros, Bruno Labastide, qu’il balade de Venise à Phnom Penh, en passant par Buenos Aires, Moscou ou Tcheliabinsk. Il a notamment été administrateur du Teatro Español. Il s’est lancé en littérature avec un roman, La soledad (titre qui se comprend dans toutes les langues), paru chez Planeta en 2014, qui a suscité l’enthousiasme de quelques lecteurs exigeants, comme Mario Vargas Llosa, et a déjà été traduit dans plusieurs pays. Il ambitionne aujourd’hui de séduire les lecteurs français, en particulier ceux qui aiment les belles constructions intellectuelles, les poupées gigognes et l’élégance déstructurée.
Tout commence à Venise, ville propice à la solitude et à la mélancolie, où a fini par s’installer Bruno Labastide, au crépuscule d’une vie d’aventures, d’escroqueries et de frime. Là, il a rencontré Keiko, une mystérieuse Japonaise qui a fait de sa demeure de Dorsoduro une espèce de "maison de thé", dans la tradition des mama-san nipponnes. Sauf qu’elle en est la seule pensionnaire, et qu’elle s’offre gratuitement, mais une nuit et une seule, à tout homme capable de la séduire par un vers, un poème ou une histoire. C’est Shéhérazade à l’envers. Bruno a eu connaissance de certaines histoires qui lui ont été racontées. Et Grueso les invente pour nous. Comme celles d’Horacio, le prescripteur de livres de Buenos Aires, ou de son ami Ricardo, le commentateur sportif qui truque le résultat d’un match par amour pour son grand-père. Ces récits alternent avec des épisodes de la vie de Bruno, y compris dans sa jeunesse, lorsqu’il était groom dans des hôtels. Avant un retour à Venise et une tentative de séduire Keiko.
Le livre est original et séduisant. Un seul bémol : le lien entre les différents récits est parfois si ténu, si acrobatique, que La soledad est plus proche du recueil de nouvelles que du roman traditionnel. J.-C. P.
