10 janvier > Histoire France > Christian Delporte

Incontestablement il fut une voix. Une voix sans issue. La voix de la collaboration sur Radio-Paris. Pourtant, Philippe Henriot (1889-1944) est passé à la postérité sans vraiment la marquer. Il a tenté d’exister en tirant un trait sur la vie des autres, les juifs, les gaullistes, les francs-maçons et surtout les communistes. A vrai dire, on l’avait un peu oublié. Au printemps 2017, Pierre Brana et Joëlle Dusseau lui ont consacré une biographie publiée chez Perrin. Moins d’un an plus tard, Christian Delporte revient sur le motif. Cet historien, spécialiste de l’histoire culturelle et politique de la France du XXe siècle, pose son chevalet pour tirer à son tour le portrait de ce triste sire.

On sent bien qu’il voudrait nous en dire plus. Mais comment faire avec une personnalité aussi moindre, empêtrée dans une histoire dont il voudrait sortir par le haut mais qui reste au cellier. Issu de la droite catholique et nationaliste, Henriot ne compte finalement que sur la débandade pour assouvir sa passion de la politique. Il n’aime pas les Anglais. Il fera avec les Allemands. Lors de la Première Guerre mondiale, il a été exempté à l’insu de son plein gré. Il a tout de même un peu honte de se trouver à l’église au milieu de ces femmes sans hommes, et dont beaucoup deviendront veuves. Mais Henriot prend le dessus. Le prof se rêve poète. Il écrit, de mauvais romans, puis des discours bien meilleurs.

Le totalitarisme le prend dans son épuisette. Il imite, il milite. Christian Delporte montre bien tout cela, la dérive fasciste, la sensation d’exister enfin, l’exaltation de trouver sa voie. Ministre de la Propagande, il est assassiné par les résistants. Sur les murs, les nazis font placarder des affiches : "Il disait la vérité. Ils l’ont tué." En représailles, la Milice à laquelle il appartenait se livre à des carnages.

Alors, provocateur ? Le mot est faible pour qualifier ce député de la Gironde qui révèle son éloquence au moment de l’affaire Stavisky et que Laval considérait "bouffi d’orgueil". En fin de compte, c’est Pierre Dac, sur la BBC, qui avait prédit son épitaphe. "Philippe Henriot, mort pour Hitler, fusillé par les Français."L. L.

Les dernières
actualités