13 septembre > essai France > Collectif Catastrophe

Ils sont jeunes, et alors ? Et alors, c’est mieux que rien, mieux que de ne plus l’être, ou plutôt d’avoir oublié de le rester. C’est-à-dire d’avoir oublié d’écrire, de chanter, de danser, de se donner en spectacle, de se tenir chaud, d’être seuls, de vivre. Les membres du collectif Catastrophe ont tous moins de 30 ans, mais se souviennent chacun de tout cela. Ils l’éprouvent au quotidien, dans les contingences incertaines du réel. Ce fut d’abord, début 2016, une tribune publiée dans Libération, manifeste inaugural intitulé "Puisque tout est fini, alors tout est permis". Il y eut ensuite un disque, une émission de radio, différentes "interventions" dans différents champs créatifs. Il y a désormais ce livre, La nuit est encore jeune, qui s’accompagne d’un album éponyme à paraître sur le très chic label Tricatel de Bertrand Burgalat.

De quoi est-il question ? D’eux et de nous, de nos solitudes et de leurs rages, de leurs rages joyeuses. En introduction, les membres du collectif écrivent : "Ce livre, nous l’avons imaginé comme une promesse faite à nous-mêmes et à ceux qui s’y reconnaîtraient. Pas plus un programme qu’un traité ou un manifeste, c’est simplement un rendez-vous donné à notre propre avenir." En l’occurrence, 67 chapitres comme autant de poèmes en prose, pour écrire la tristesse d’un siècle qui s’enfuit, emportant avec lui l’idée même de finitude, l’attente ardente de celui qui vient. Tout là n’est affaire que de liens défaits, d’amitié, de refus d’assignations à résidence et de style. Ce style, au lyrisme comme gorgé de tristesses tues, qui rappellera au lecteur que l’un des membres fondateurs du collectif est la merveilleusement douée Blandine Rinkel dont le premier roman, L’abandon des prétentions (Fayard), fut l’un des livres forts de ce début d’année. Elle n’est pas seule bien sûr, et Catastrophe flâne sur les terres de quelques-unes des belles aventures collectives du siècle dernier, de leur volonté d’hybridation, du surréalisme jusqu’au situationnisme en passant par le Grand Jeu ou la bande à Marc’O. En ces temps orphelins du collectif et de la poésie, l’exercice est hautement profitable. O. M.

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